Boîte à métiers Industries du futur - Métier orientation industrie

Les Boites à métiers pour les demandeurs d’emploi : comment adapter nos médiations ?

Publié le

23 Nov. 2023

Écrit par :

Photo portrait de Thierry souriant — Thierry Duhagon

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Conçues à l’origine pour un public essentiellement scolaire, les Boites à métiers à destination des demandeurs d’emploi nous ont conduit à repenser nos actions et notre discours. Oui… mais comment ?

Tout d’abord, petit rappel de ce qu’est une Boîte à métier. Il s’agit d’un projet lancé en 2013 par Instant Science (à l’époque Science Animation) et la Fondation C.Génial, et qui consiste à proposer à des élèves de la 3e à la Terminale une nouvelle approche des métiers scientifiques et techniques. On intervient donc directement dans les classes, auprès des élèves, pour leur présenter une thématique scientifique et les métiers qui lui sont associés. Avec notre valise métiers, on part d’un objet « totem » qui permet d’introduire l’animation et de présenter toute la chaîne des métiers qui intervient dans son cycle de fabrication, de la conception à sa réalisation, par le biais de cartes métiers et d’un jeu de rôle.

Ici, les actions menées dans le cadre du dispositif Info Métiers de la Région Occitanie ont pour objectif d’informer les adultes non scolarisés en recherche d’emploi, de formation ou de reconversion professionnelle sur la pluralité des métiers dans une filière.

La diversité évidente des publics rencontrés (âge, expérience professionnelle, diplôme, situation familiale et/ou financière, primo arrivants …) ainsi que de leurs attentes peut rendre cet exercice un peu plus complexe qu’il n’y parait.

Ceci doit nous conduire à réfléchir sur l’adaptation de nos outils et de nos discours, jusque-là adaptés à un public essentiellement scolaire (collégiens et lycéens).

Contenu de la Boîte à métiers

Un public adulte des plus éclectiques

Parmi ces adultes non scolarisés, nous retrouvons un public :

En recherche d’emploi : jeunes diplômés qui cherchent à entrer dans la vie active, ou ayant vécu une perte d’emploi (licenciement économique, problème de santé ou handicap) ;
En recherche de formation : jeunes en situation précaire, échec scolaire, absence de cadre familial ;
En recherche de reconversion professionnelle souhaitée ou contrainte (licenciement, santé ou handicap).

Pour rappel, des professionnels interviennent dans le parcours de ce public afin de les conseiller et de les guider vers un retour à l’emploi.

Depuis 3 ans, à la Maison de ma Région de Figeac, je présente les métiers de l’aéronautique, épaulé par le GRETA qui expose différentes formations, mais aussi de Pôle Emploi ou d’entreprises, qui présentent leurs offres d’emploi.

Grâce à cette synergie, la boucle est alors bouclée. Lors de ces présentations, 2 à 3 formations dans l’aéronautique sur les matériaux composites ou sur l’usinage ont ainsi convaincues de nombreux participants avec la garantie d’un emploi après la formation !

Depuis, nous avons également adapté toutes nos Boîtes à métiers sur divers secteurs : numérique, agroalimentaire, santé…

Comment adapter son discours à ce public ?

Pour ne pas faire un flop avec ces jeunes ou moins jeunes, avec des personnes dont la préoccupation est souvent de boucler la fin du mois avec une famille à charge, de redonner un sens à leur vie, il est important :

De savoir faire preuve d’empathie ;
De se mettre à la portée de ces différents publics (parfois mélangés durant une même intervention) ;
(Pour ces deux précédents points, cela vaut pour toutes médiations)
De connaitre les métiers demandés, les offres de formation sur le territoire et l’état du marché du travail dans le secteur.

Le problème récurrent est celui de la mobilité.

Consulter quelques offres d’agences d’intérim donne un bon reflet de la situation sur un territoire. Penser également à consulter les formations financées par la Région afin d’avoir une idée sur les métiers en tension à l’échelle de la région. La géographie des lieux de ces formations renseigne aussi sur les besoins d’un territoire et la nécessité, parfois, de se rendre un peu mobile.

Il faut savoir que les Boîtes à métiers sont composées de cartes métiers qui permettent la présentation des différentes possibilités offertes. Nous avons néanmoins fait un tri, en écartant des métiers nécessitant de trop longues études. Nous les évoquons rapidement, mais allons avant tout, faire des métiers accessibles à toutes et tous.

Présenter 10 ou 50 métiers n’a aucun sens si on ne tient pas compte de la spécificité de nos publics et des besoins réels des entreprises. Il faut trouver le compromis entre ce que la personne à envie de faire et les besoins des entreprises.

Réussir à susciter de la curiosité, faire naitre une envie et peut être réussir à éclairer quelques horizons pour redonner un peu d’espoir reste le but principal de ces interventions.

Si là, nous réussissons à allumer une mèche, je pense que nous avons fait notre boulot.

Les professionnels que nous avons évoqués ci-dessus prendront ensuite le relais pour mener ces projets à leur terme.

Comment se déroule une intervention Boîte à métiers avec des personnes en recherche d’emploi ?

Nous commençons par un tour de table pour une présentation sommaire de chacun des participants.Parfois ils se livrent un peu et parfois non. Je ne force jamais rien et préfère instaurer une relation de confiance, non intrusive.

Lors de ce petit tour de table, chacun évoque :

Prénom : leur utilisation à la place du traditionnel monsieur ou madame permet de dialoguer ensuite dans une ambiance plus détendue ;
Niveau de formation ou diplômes ;
Attentes : recherche d’emploi, de formation, de reconversion ?

Les groupes restent à taille humaine, et, autour d’une tasse de café, ce tour de table permet parfois de se « lâcher » un peu. Certains vous tutoierons directement. Les plus jeunes où ceux qui, à vue de nez, pensent être du même âge que vous. Cela peut sembler un détail…. Je ne le crois pas. Cela participe à l’instauration d’un climat de confiance et à des échanges plus détendus.

Nous poursuivons avec un temps de présentation du domaine, sous forme de discussion, ce qui permet d’estimer leurs connaissances sur la thématique et donc d’adapter son discours. Ce temps de discussion peut être agrémenté d’un quiz, qui reste quelque chose de ludique même avec les adultes. Cela permet aussi de débattre de sujets de société et d’amener à des réflexions sur l’évolution des métiers dans certains domaines.

Puis vient la partie que l’on nomme « jeu de rôles » sur la version scolaire, mais que nous traitons autrement dans ce cas-là. Tout simplement parce que le public et son vécu parfois éprouvant ne s’y prête pas. Le jeu reste le même qu’avec les scolaires, avec le même matériel. Toutefois, l’objectif de jeu est un peu différent : l’idée ici n’est pas de leur faire incarner un rôle-métier mais plutôt de les inciter à placer les badges métiers au sein des bonnes missions afin qu’ils puissent avoir une vue globale du domaine présenté et des métiers possibles. La réflexion se fait tous ensemble ou en petit groupe.

Autre différence avec la version pour scolaires : nous sélectionnons les missions en amont, celles qui nous semblent le plus intéressante pour ce type de public et les plus accessibles.Pour la Boîte à métiers aéronautique, nous utilisons des maquettes, des matériaux et des pièces d’avion afin de leur mettre dans les mains, les faire manipuler : peser, toucher, observer, sauter à pieds joints sur du nid d’abeille (ça c’est un succès garanti à chaque fois !).

À la fin, un temps de présentation en direct de la plateforme jemeformeenrégion.fr est aussi proposé, notamment en recherchant des formations ou des offres d’emploi sur des métiers qui ont éveillé leur curiosité pendant le jeu. Enfin, nous laissons aux participants et encadrants une sélection de documents au format numérique. Guides des métiers, documents de la région, annuaire des entreprises…

Chaque animation est différente en fonction du public. Ici, plus qu’ailleurs, il faut être particulièrement humble, rester à l’écoute permanente (un simple regard peut en dire très long). À vous de vous adapter et de rebondir. S’il y a bien un métier où l’on apprend toute sa vie, c’est la médiation et le fait d’être face à un public.

Une ouverture vers d’autres thématiques

Au-delà de la partie purement informative sur les métiers, ces interventions permettent également :

D’informer afin de déconstruire une image encore trop souvent négative ou non accessible du monde scientifique, technique et industriel ;
D’évoquer la place des personnes en situation de handicap et des structures qui aident à l’insertion ;
De mettre en exergue l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, tout en évoquant les différents types de discrimination ;
De parler des enjeux du développement durable, de la lutte contre le réchauffement climatique, des émissions de CO2 qui impactent tous les métiers.

Ces actions en direction des adultes demandeurs d’emploi sont celles qui me motivent le plus. Elles me demandent plus de préparation, plus d’énergie.

Encore récemment, un jeune qui a découvert la peinture aéronautique jeudi dernier et qui a eu un coup de cœur pour ce métier. Il lui faut une formation là, maintenant, de suite, en urgence… ou il se retrouvera en situation irrégulière et devra quitter le pays avant la fin de l’année sans plus aucun espoir d’un meilleur avenir ! Nous allons remuer ciel et terre avec deux formatrices pour lui trouver quelque chose d’ici le 15 décembre !

Il y a des histoires de l’ordre de l’humain derrière ces interventions Infos Métiers, et cela peut aussi créer des liens avec des gens qui continuent à vous tenir au courant de leur situation quelques mois plus tard.

Alors si en lisant cet article, vous avez vous aussi envie de partager avec moi vos retours d’expériences, ressentis, idées ou autres propositions d’adaptation de nos outils… ou même avis contraire, n’hésitez pas ! C’est cette réflexion collective qui nous permettra de continuer à avancer et d’adapter au mieux les actions pour nos publics.