L’année 2024-2025 marque, pour Instant Science, la 9e année de participation au Parcours laïque et citoyen autour de l’exposition “Sommes-nous tous de la même famille ?” et ses ateliers-débats sur les origines de l’Homme, permettant ainsi de mener, en classe, une réflexion, aussi riche que complexe, pour lutter contre les préjugés et les discriminations, en s’appuyant sur un discours scientifique.

Le Parcours laïque et citoyen, c’est quoi ?

Depuis 2016, le Conseil départemental de la Haute-Garonne offre à l’ensemble des collégiennes et des collégiens du département la possibilité d’accéder à des actions éducatives au travers du Parcours laïque et citoyen. Dispositif unique en France, il a été conçu pour sensibiliser les élèves aux principes de laïcité et aux valeurs qui fondent notre République.
A l’heure où ces valeurs sont régulièrement ébranlées par des dérives complotistes ou des événements tragiques, le Conseil départemental a décidé de consolider et d’étendre la portée du Parcours laïque et citoyen afin de pouvoir toucher un public toujours plus nombreux et plus jeune, en élargissant son accès aux élèves en classe de CM2 en 2021, puis de CM1 en 2022.
Pour l’année scolaire 2024-2025, pas moins de 220 actions sont proposées dans le cadre de ce dispositif.

Un Parcours laïque et citoyen autour d’une exposition-jeux-débats

C’est dans ce cadre que notre équipe de médiation intervient pour présenter et animer l’exposition “Sommes-nous tous de la même famille ?” qui permet, en se basant sur une approche scientifique et des scénarios pédagogiques, de mener une réflexion, en classe, sur les problématiques sociétales liées au racisme et au communautarisme.

L’exposition invite à tourner les pages d’un carnet de recherches pour découvrir les notes et réflexions de différents scientifiques (préhistorien, paléontologue, généticien, anthropologue, géographe…) et tenter de répondre à la question : sommes-nous tous de la même famille ? Elle aborde ainsi des sujets aussi majeurs que les préjugés racistes, les stéréotypes sociaux, l’inégalité des droits, les migrations, les origines de l’Homme ou encore la notion d’espèce.

Durant l’année scolaires 2024-2025, notre équipe de médiation intervient dans 5 collèges de Haute-Garonne (Collège Louisa Paulin à Muret ; Collège Condorcet à Nailloux ; Collège Georges Chaumeton à L’Union ; Collège Anatole France à Toulouse : Collège Jules Valles à Portet-sur-Garonne).
Trois à quatre classes par collège bénéficieront de ce dispositif.
Lors d’une séance unique de 2h, les élèves découvrent l’exposition “Sommes-nous tous de la même famille ?” et ses manipulations interactives avec l’intervention d’une médiatrice ou d’un médiateur (1 heure par classe).
De plus, l’exposition est présentée pendant une semaine au sein de l’établissement, généralement au CDI, afin que le maximum d’élèves puisse en bénéficier.

Un format d’animation favorisant les échanges

Ce format d’animation exposition-jeux-débats fonctionne très bien pour aborder des sujets sensibles ou tabous. Ainsi, la partie exposition permet de s’appuyer sur des contenus rigoureux et variés (photos, dates, graphiques, etc.), sur lesquels les élèves peuvent d’ailleurs revenir ultérieurement. Les activités permettent aussi de créer des situations pendant lesquelles la parole et les questions sont libres.

C’est aussi l’occasion d’être confrontés à des questions que l’on n’aurait jamais imaginées. Avec une approche directe, notre équipe de médiation peut interroger les élèves sur leur vécu et leurs expériences personnelles. Cet espace de discussion permet alors d’aborder, au sein d’une même classe, en dehors de la relation élèves-professeurs ou parents-enfants des sujets parfois évités, ou jamais abordés entre les élèves aux opinions différentes (voire opposées !). Il met aussi en lumière le quotidien de celles et ceux exposés aux stéréotypes et aux problèmes du racisme en France.

Retours d’expérience de l’équipe de médiation

Quel est votre ressenti lors de l’intervention ?

Intervenir sur le Parcours laïque et citoyen n’est jamais simple. Les sujets abordés dans cet atelier sont sensibles, car ils vont toucher à des représentations du monde qui peuvent rentrer en confrontation. Et c’est dès les premières minutes que cela peut se mettre en place lorsque l’on retrace l’histoire de la Terre et du développement de la vie sur notre planète. Pourtant, c’est ce qui rend son animation si intéressante en tant que médiateur, réussir à parler de sujets sensibles sans faire transparaitre ses opinions !”

“Lorsqu’on anime pour la première fois, on peut avoir un peu peur de se heurter à de la défiance ou des sujets épineux. Mais l’exposition est très bien construite et sourcée pour avoir réponse à tout quoi qu’il arrive. Finalement il est très rare qu’il y ait un malaise car en alternant jeux/questions/ explications, il y en pour tout le monde.”

“Personnellement, c’est une exposition que j’adore. Elle aborde tellement de sujets scientifiques et de société et je pourrais passer des heures à en discuter et débattre avec les élèves. C’est vrai qu’en début d’animation, il y a toujours une petite appréhension car on ne sait jamais qui on va avoir en face de nous : comment vont-ils réagir ? J’espère que je ne vais pas avoir à faire à trop de remarques déplacées / désobligeantes / racistes etc.  Aujourd’hui on a eu 4 groupes très impliqués et intéressés, ce qui facilite énormément le bon déroulement de l’animation. Mais il est vrai que cela dépend énormément des élèves que l’on a en face. Je trouve aussi que cette animation est un très bon moyen de prendre conscience de ce qu’il se passe au sein de la classe et de l’école. Par exemple, aujourd’hui lorsque l’on a évoqué les stéréotypes, les élèves m’ont tout de suite parlé d’une élève du collège qui refusait de mettre ses lunettes car elle trouvait que cela faisait trop “intello”. Aussi, j’adore le challenge que représente cette animation. Il faut réussir à parler de sujets sensibles sans laisser paraître ce que l’on pense personnellement. Il faut adopter une posture neutre et factuelle et ne pas laisser notre langage non-verbal prendre le dessus quand on entend une remarque d’un élève, ce qui n’est pas toujours évident. Je trouve que c’est un très bon exercice pour un.e médiateur.rice.”

Comment cette animation est-elle accueillie en classe ?

“Cette animation est accueillie avec un peu de réticence dans les premières minutes, puis dès le début des activités, l’intérêt et la curiosité se font ressentir. Certaines des images et illustrations sur les panneaux amènent de fortes réactions : du rire, des questionnements, de l’incompréhension ou même de la surprise. L’aspect ludique et participatif est idéal pour garder une intervention dynamique, et garder l’attention des élèves !”

“Les élèves semblent très timides au début, mais plus on avance plus les langues se délient et les questions se multiplient. Ils ont les yeux qui pétillent de curiosité et/ou perdus dans des réflexions (surement en train de préparer leur prochaine question).”

“L’animation a été très bien accueillie dès son début, aussi bien par les élèves que par les enseignants. Toutes et tous étaient très intéressés et à l’écoute tout au long de l’animation. Il y a eu beaucoup de moments d’échanges très enrichissants entre les élèves. Ce sont des moments que j’essaye de favoriser au maximum (tout en gardant un œil sur le timing et en cadrant au besoin), car ils ont peu d’opportunités d’échanger réellement voire de débattre dans leurs cours au quotidien. Je m’appuie ensuite sur ces échanges en reprenant leurs exemples, en explicitant des remarques que j’ai entendues et qui ne sont pas forcément 100% justes scientifiquement parlant.”

Quelle attitude adopter face une question qui porte à controverse ?

“Essayer de comprendre pourquoi cette question a été posée est important. En demandant à l’élève de reformuler ou d’expliquer les termes qui sont employés dans la question, on peut voir s’il s’agit d’une incompréhension, d’un manque d’informations, ou bien de propos fondamentalement problématiques. Certaines questions peuvent aussi avoir un impact direct sur les personnes présentes dans la classe, et il n’est pas toujours possible de le savoir. Donc il faut être vigilant à ce que tout le monde se sente à l’aise. Puis, en fonction de la question, on peut renvoyer l’élève à plusieurs des panneaux présents dans l’exposition, faire participer le groupe entier, et se baser sur les faits plutôt que les avis ou opinions (en rappelant la démarche scientifique au passage).”

“Étape 1 : désamorcer les émotions que peut générer la question. Étape 2 : reprendre les éléments de la question pour faire émerger ce qui est controversé. En clair, qu’est ce qui choque et pourquoi ça choque. Étape 3 : reprendre les éléments de l’exposition et démontrer que ce sont des faits, et comment on s’assure que ces faits sont irréfutables. Dernière étape : Reformuler la réponse globale. Et surtout très important, rappeler que la science démontre et expose des faits et non des croyances. Rappeler que certains éléments relèvent de la croyance, propre à chacun et que l’on n’est pas là pour débattre autour de croyances mais de faits. Nous sommes là pour expliquer le comment, pas le pourquoi.”

“Dans ce genre de cas, j’aime bien poser des questions ouvertes. Retourner la question à l’élève en lui demandant ce qu’il en pense ou ce que ses camarades en pensent. Cela favorise un échange d’idées plutôt qu’une confrontation. J’essaye aussi de faire en sorte que l’élève reformule sa question pour la rendre constructive, pour en extraire l’essence sans le juger. Aussi, j’essaye au maximum de répondre en me basant sur des faits établis. Cela aide à dissocier la question des opinions personnelles. Et surtout, si une question est particulièrement controversée ou hors de mon domaine de connaissance, je n’hésite jamais à dire que le sujet est complexe, que je ne connais pas tout et à proposer d’y réfléchir ensemble, voire d’aller chercher l’information plus tard.”

Des questions inattendues qui peuvent faire sourire…

“Si on est tous pareils alors pourquoi il y a du racisme ?” ; “Mais les dinosaures c’était il y a hyper longtemps en fait ?” ; “On ne descend pas du singe puisqu’on ne vit pas dans des arbres” ; “Ça veut dire qu’il y a super longtemps on était tous des poissons !” ; “Mais finalement les stéréotypes c’est comme quand on dit que le vendredi 13 porte malheur non ? “; “Mais les homo sapiens quand ils ont décidé de migrer, comment ils ont su où aller ? Genre ils ont pris un chemin et ils se sont dit let’s go on va par là.”

Parcours Laïque et citoyen
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